Celui ou celle qui vous a quittés avait des enfants... Vos petits-enfants.
"Au
moins vous avez vos petits-enfants" avez-vous entendu. Oui, bien sûr... Mais ils sont loin... Mais quelle arrachement de les voir sans leur papa ou leur maman... Mais affronter leur peine est
parfois si lourd... Mais comme ils lui ressemblent, plaisir de le retrouver en eux, douleur qu'ils ne soient plus là...
Comment continuer une relation quand la donne a changé ? Quand le compagnon de votre enfant perdu aura quelqu'un d'autre que votre enfant dans sa vie, semblant prendre sa place dans
le foyer ?
Usant de ne plus savoir où on en est. On
ne sait plus quoi faire de ce chagrin trop lourd à porter...
" Pour les grands parents, il est très difficile de comprendre le départ de leur petit-fils ou de leur petite- fille. Ce n'est pas dans la logique des choses ! Les personnes âgées doivent partir avant leurs enfants, leurs petits enfants. C'est ancré dans leur éducation. "
CHRISTIAN BOBIN (La plus que vive) - Extrait :
Je me promène avec Clémence au parc de la verrerie.
Il y a une cabine téléphonique installée pas loin des jeux. Parfois, le mercredi, quand je voyais qu’elle et moi allions rentrer à la maison plus tard que prévu, je t’appelais de cette cabine, je
t’expliquais que nous ne serions pas là à l’heure convenue mais que nous rentrerions bien, sains et saufs, barbouillés de rires, qu’il ne fallait pas t’inquiéter.
Clémence, une semaine après ta mort, me montre cette cabine dans le parc. «Et si on l’appelait», me dit-elle. Je la fais entrer dans la cage de verre, je l’installe sur le rebord métallique qui sert pour les annuaires et je la regarde décrocher l’appareil, appuyer sur toutes les touches du cadran, et, pendant plusieurs minutes, se taire, écouter, n’intervenant que pour dire «oui, oui». A la fin je lui demande : «Qu’est-ce qu’elle t’a dit ? » Elle me répond : «Elle demande si tout va bien et si on est encore tous ensemble. Je lui ai dit que oui et que je continuais à faire des bêtises avec le gros bêta. » Puis nous sortons de la cabine et revenons au doux travail de rire et jouer.
Il y a mille façons de parler aux morts. Il fallait la folie d’une petite de quatre ans et demi pour comprendre que nous avions peut-être moins à leur parler qu’à les entendre, et qu’ils n’avaient qu’une seule chose à nous dire : vivez encore, toujours, vivez de plus en plus, surtout ne vous faites pas de mal et ne perdez pas le rire.